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Inscrit(e) : décembre 2004 Situation géographique : près de Boulogne sur mer Métier : surtout des 6èmes cette année
Allez, une seconde fournée. Désolé, c'est assez long.
Il y avait là foule d'oiseaux en nuées folles , volant sous le ciel que les vents déposent ici , sous le regard borgne et borné qui met à jour d'entre toutes les plus sombres pensées.
Il y avait moi dans ce décor de sable gris, les cheveux mêlés de l'eau des nuées, deux pieds sous la terre et les yeux brûlés de sel , les lèvres béantes sur une bouche vide : pour plus un traître mot, allions nous le silence !
De chaque oiseau volant pendait une corde, corde qui prenait racine au creux de mes poings. Au creux de mes poings que je ne pouvais ouvrir sans laisser s'arracher lambeau de ma chair.
Au creux de mes poings nus que je laissais souffrir sans relâcher la tension de chaque corde. Au creux de mes poings rougis de la douleur brute, muette conséquence du vol délirant de ces folles nuées muées en cerfs-volants.
A genoux , fou qui espérait lier le tout !
Les bras levés par l'intolérable tension, priant et suppliant sous le néant des cieux que cessent enfin tous les vents qui tendent les liens, brisant le dernier orgueil de mâle assurance, maintenu malgré lui par son rêve avéré, détenu malgré lui et par sa volonté.
Détenu malgré moi, et par ma volonté...
Dessous le ciel et dessus la terre , arrimé, navire immobile sur les courants des grands fonds. Expulsant à toute force un regard vers eux, je voyais dans leurs yeux flous mon propre reflet : une cicatrice sombre à visage d'homme .
Et c'est soudain la Terre qui se mit à tourner, à l'inverse du vol des oiseaux reliés, arrachant un à un les filaments vivants, brisant liens et barreaux dégoulinant de sang.
Et lentement laisser seul à genoux le fou, pleurant prison perdue et liberté gagnée.
Ouvrant mes mains pour enfin constater les plaies, je vis mil ombilics entre mes doigts percés. Levant les yeux au départ des vives nuées, je vis mil oiseaux disparaître et quelques uns rester.
Levant les pieds de dessous le corps de la terre , je vis une ombre d'ange se poser sur moi. Tournant la tête de côté pour l'accueillir. Il n'y avait personne que moi et l'ombre. Et l'ombre était mienne, surmontée de ses ailes.